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Des risques individualisables ?

Cette séance de TransNum, organisée avec la Chaire PARI, s'intéressera aux enjeux et limites du secteur assurantiel.

Event, TransNum Seminar

Depuis la fin du XVIIIe siècle, l'industrie assurantielle repose sur un principe de mutualisation : tous (ou en tout cas un grand nombre) cotisent pour se couvrir contre un risque qui ne frappera que quelques-uns. La différence entre les sommes cotisées et celles qui sont versées rémunèrent les assureurs, dont le modèle économique repose sur la mobilisation d'outils mathématiques - les probabilités - dont le développement accompagne celui de cette industrie.

L'arrivée des données massives est-elle susceptible de remettre en cause ce modèle ? La discussion sera menée d'un triple point de vue : historique, épistémologique et économique.

Cette séance du séminaire TransNum est organisée en partenariat avec la Chaire PARI.

Programme

"Un regard historique" par Pierre François (CNRS, CSO, Chaire Pari) 

Une première intervention montrera que la possibilité, que l'on impute aujourd'hui aux données massives, de faire en sorte qu'en matière financière, chacun paye un prix qui corresponde au risque qu'il encourt - cette possibilité, donc, n'est pas nouvelle. On en donnera trois exemples, en évoquant d'abord les pratiques assurantielles antérieures à la mobilisation du calcul des probabilités, quand assurer un risque s'assimilait à un pari et que la décision dépendait d'une appréciation morale sur l'intéressé qu'il était question d'assurer ; puis les tentatives effectuées, dans les années 1960 et 1970, de segmenter le marché de l'assurance automobile ; enfin, les différentes pratiques du credit scoring qui, depuis le début du XXe siècle aux Etats-Unis - et depuis les années 1970 en France - structurent les services bancaires aux particuliers."

"Un regard épistémologique" par Laurence Barry (Chaire Pari)

Les scores sont partout. Que l’on accepte ou non l’idée d’une révolution apportée par le big data, force est de constater que les nouveaux modèles servent à classer, trier, choisir et organiser le monde grâce à l’attribution de scores. Là où auparavant on se contentait de catégoriser les personnes dans des classes d’équivalence assez larges, les techniques actuelles cherchent à appliquer à chacun un nombre, à la fois probabiliste et individuel. Le sens possible ou supposé de ces scores n’a pourtant rien d’évident, même si la question en est rarement posée. Nous essaierons dans cet exposé de retracer les débats historiques sur l’interprétation des probabilités, et la façon dont leur application est comprise en assurance. De ces interprétations, aucune ne s’applique parfaitement aux scores actuels, sauf peut-être la propension proposée par Karl Popper … dans le contexte d’une polémique de mécanique quantique. Une tentative d’application aux phénomènes sociaux sera enfin proposée, qui remet singulièrement en cause la mythologie de l’analyse prédictive.

"un regard économique" par Arthur Charpentier (Université du Québec à Montreal)

On verra l'analyse économique d'un marché d'assurance, où l'achat d'une couverture est parfois optionnelle, et l'assuré utilise une probabilité subjective d'avoir un accident, face à un assureur qui a parfois d'avantage d'informations. Nous discuterons le cas particulier de l'assurance médicale et de l'assurance automobile. Dans un second temps, nous reviendrons sur le risque de catastrophes naturelles, où l'estimation de la probabilité d'une inondation nécessite, pour l'assureur, de faire appel à nombre de modèles (climatiques, hydrologiques), avec en plus, la difficulté posée par le changement climatique. Mais comme nous le verrons, si ces calculs de probabilités donnent parfois l'impression qu'il existerait un "prix juste" à un risque, la question centrale reste celle de l'acceptabilité, individuelle pour les assurances facultatives, mais aussi bien souvent sociale…

Informations pratiques

Compte-tenu des mesures de distanciation physique toujours en vigueur  à Sciences Po, la présentation se fera en ligne sur la plate-forme Zoom.

Inscription préalable obligatoire : s'inscrire