Politique de l’écriture : trois essais sur le traitement journalistique de l’information politique
Rubing Shen
Cette thèse revisite des questions classiques sur la relation ambiguë entre les journalistes et la politique. Comment les journalistes parlent-ils de la politique, et de quoi ne parlent-ils pas ? Dans quelle mesure les journalistes peuvent-ils être politiques à l'ère de l'objectivité de l'information ? Je montre que ces questions anciennes peuvent être abordées à nouveaux frais en combinant des approches sociologiques établies avec des techniques récentes d'analyse computationnelle des textes, permettant d’augmenter l’analyse manuelle de contenu. Le premier article mène une expérience pour démontrer la validité de cette approche pour répondre aux besoins de la recherche sociologique. La méthodologie est ensuite appliquée à deux études empiriques sur la couverture de l'actualité politique : l'utilisation de sources anonymes, et l'expression de biais partisans. Les deux études documentent de manière détaillée les transformations à long terme du traitement journalistique de l’information politique en France, et interrogent les modes par lesquels les contraintes externes peuvent plus ou moins exercer une influence sur ce dernier. Le deuxième article suggère que l'augmentation de l’usage des citations anonymes par les journalistes politiques résulte d'un renouvellement générationnel plutôt que d'une adaptation aux conditions de production contemporaines. Le troisième article montre que les biais idéologiques ne peuvent être introduits dans l’écriture journalistique que de manière euphémisée et réfractée. Au-delà du journalisme, cette thèse vise à contribuer aux débats actuels en sociologie de la culture en lien avec la théorie de l’action.