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Les fractures de l’espace public numérique aux États-Unis et en France

Le 8 octobre dernier, Média en Seine, le 1er festival des médias de demain donnait la parole à Ethan Zuckerman, Dominique Cardon et Bruno Patino pour comparer les résultats de deux études parallèles sur le fonctionnement des médias aux Etats-Unis et en France.

Chronique

Basées sur une méthodologie commune utilisant l’outil MediaCloud développé au MIT, ces deux études mettent en lumière le rôle primordial de la structure d’ensemble de l’espace médiatique, articulant grands médias et réseaux sociaux, pour comprendre les nouveaux circuits de l’information. 

Un état des lieux aux États-Unis

Yochai Benkler et ses collègues du Berkman Klein Center d’Harvard en association avec le Civic media center du MIT Medialab ont analysé les interactions au sein d'une centaine de sources médiatiques pendant et après les élections américaines de 2016. Cette enquête fait apparaître la très forte polarisation de l’espace médiatique américain. Un groupe dominant de médias du centre-gauche au centre-droit (de MSNBC au Wall Street Journal), s’oppose à une nouvelle polarité dominée par Fox News et Breitbart. Ce clivage a été produit par la campagne électorale de Donald Trump et peut se comprendre comme une véritable prise de pouvoir de Fox sur les médias traditionnels du centre-droit aux Etats-Unis. Relayant, en les “blanchissant”, les informations conspirationnistes issues des sites à plus faible audience de l’extrême-droite américaine, la chaîne de télévision a produit ce clivage  en accusant tous les autres médias de produire des fake news. Ces deux sous-espaces qui sont en quelque sorte imperméables l’un à l’autre indiquent une extrême polarisation politique de l’espace médiatique états-unien.

...et en France.

L’étude menée au médialab examine les liens (citations) entre 400 médias français. L’analyse de ces relations entre contenus journalistiques ne révèle pas d’un clivage politique droite/gauche comme on le trouve aux Etats-Unis. La coupure identifiée dans le cas français se fait hiérarchiquement entre des médias de l'élite (que sont les grand.e.s quotidiens et radio, au centre du système médiatique) et la périphérie (blog, sites contestataires ou en marge de l’espace public). 

Dans la sphère d’influence de Twitter, le rapprochement des médias ayant été cités par un même compte révèle une structuration équivalente à celle opérée par les professionnels de l’information, avec toutefois un peu plus de porosité entre les extrêmes et le centre. Mais c’est sur Facebook que l’on constate un écart conséquent entre le traitement médiatique de l’information et la nature des contenus en circulation. L’analyse réalisée sur les discussions autour du mouvement des gilets jaunes souligne notamment  le risque de déconnexion  entre une élite parisienne et une population plus rurale dont les préoccupations ne sont pas prises en considération.

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